Avant novembre 1942 : un premier noyau
de résistance dans l’armée d’armistice

En 1940, aux termes de la convention d’armistice imposée à la France, l’armée française est réduite à sa plus simple expression, formellement limitée à 100 000 hommes.
En février 1941, le Général Jean VERNEAU (X1911) qui avait été chef d’État-Major du Général Noguès à Alger, est nommé au poste de Chef d’État-Major de l’Armée à Vichy, avec tout ce que cela implique d’acceptation des choix majeurs de Vichy. Mais il s’efforce de développer des actions clandestines au sein de l’armée d’armistice : stockage et entretien d’armes et de munitions qui serviront plus tard aux maquis ; organisation de réseaux clandestins de transmissions (Capitaine Edmond COMBAUX, X1924), de trois services (étude, sécurité, contrôle radioélectrique) avec le Commandant Marien LESCHI (X1922), le Lieutenant-Colonel Paul LABAT (X1919), mpf au Struthof, Gabriel ROMON (X1925), mpf fusillé. Le Service National de Statistique, dirigé par René CARMILLE (X1906) établit clandestinement des listes de mobilisables (mais il proposa d’associer son service aux lois antisémites de Vichy) ; il fut finalement arrêté et mourut en déportation à Dachau.
Un 2ème Bureau clandestin fut en liaison avec des organisations de résistance, notamment Résistance-Fer (Capitaine MAIRE, X1931). Des plans d’emploi furent établis, en particulier en cas d’invasion de la zone Sud (Colonel Georges CLOGENSON, X1917). Celle-ci se produit en novembre 1942, mais les plans de Verneau (mise en alerte des Divisions par le Commandant René BOSC, X 1922) sont contrecarrés par le Général Bridoux, Secrétaire d’Etat à la Guerre à Vichy. Le 27 novembre 1942, Hitler envoie à Pétain le télégramme suivant : “J’ai donné l’ordre de démobiliser les unités de l’Armée française qui, à l’encontre des ordres de leur propre gouvernement, sont entraînées par leurs officiers à une résistance contre l’Allemagne”.

Après novembre 1942 : l’Organisation de Résistance
de l’Armée (O.R.A.)

Autour de ce noyau, l’O.R.A. est créée après l’invasion allemande en zone “libre”. Conçue à l’origine comme une antenne métropolitaine de l’armée d’Afrique du Nord du Général GIRAUD, l’O.R.A se veut avant tout “militaire, donc apolitique” ; ce qui explique, autant que des divergences sur les modalités de l’action à mener, que l’O.R.A. ait longtemps gardé ses distances avec les autres mouvements de Résistance. Elle se joint finalement, en 1944, aux autres résistants sous l’égide du Général de GAULLE.
Le Général Verneau succède à la tête de l’O.R.A. au Général Frère, arrêté en 1943, déporté et mort au Struthof. Il est lui-même arrêté le 23 octobre 1943 et meurt en déportation à Buchenwald le 14 décembre 1944.
L’O.R.A. s’est rapidement développée en zone Sud, grâce aux cadres et à l’armement camouflé par l’Armée d’armistice. En zone Nord, elle a été créée par René COGNY (X1925), arrêté et déporté avec Verneau, et développée, jusqu’à couvrir toute la zone occupée, par Charles AILLERET (X1926), remplacé après son arrestation et sa déportation par Gilbert ANDRIER (X1928).
Parmi les actions militaires de l’O.R.A., l’exposition donne en exemple les combats dans le Sud-Ouest (barrages de la Moyenne-Dordogne, groupe Pommiès).
Le successeur du Général VERNEAU jusqu’à la Libération, le Général Revers, a comme adjoint le Général Pierre BRISAC (X1919 S). Engagé volontaire à 18 ans dans la guerre de 14-18, chef d’État-Major du Général de LATTRE en 1940, le Commandant BRISAC, prisonnier, s’évade ; il reste cadre de l’Armée d’armistice par dérogation exceptionnelle au statut des juifs. Après la dissolution de cette armée, il devient un des responsables principaux de l’O.R.A. Il commande l’Ecole polytechnique de 1945 à 1950, succédant au Général Louis DECHARME (X1900), lui-même membre de l'ORA, qui avait été nommé en Septembre 1944.

D’autres officiers d’active passés à la Résistance
En dehors de l’O.R.A, d’autres officiers d’active (et en 1940, beaucoup sont d’anciens élèves de l’X) se distinguent dans la Résistance intérieure ou extérieure, certains très tôt après la défaite de 1940.
Jean DEBAY (X1931) participe, avec le 6e R.T.S., à la libération de Toulon, et y recense trente autres polytechniciens artilleurs. Maurice ROUSSELIER (X1933) (colonel RIVIER), après avoir été le chef de l’A.S. dans la région R4 (Sud-Ouest), commande les F.F.I. de la région R5 (Centre) pendant les combats de la Libération.
Du côté des aviateurs, le S.R. Air est dès novembre 1942 dirigé par René GERVAIS (X1928), Compagnon de la Libération, à la suite de son camarade Paul BADRE (X1926). Pierre ROLLAND-FOXONET (X1934) y travaille dès ses débuts. Autre exemple : le commandant Pierre MARCHAL (X1921), affecté à l’État-Major de l’Air à Vichy, s’y met en liaison en 1942 avec les services de renseignement de la France Libre, qu’il rejoint à Londres à la fin de l’année. Parachuté en France en septembre 1943 comme délégué militaire pour la zone nord, arrêté dès son arrivée à Paris, il s’empoisonne pendant son transfert à la Gestapo.
Dans un autre type de résistance, on retrouve dans le comité directeur du Front National en zone nord, en tant que conseiller, le général Paul BLOCH alias DASSAULT (X1901), gouverneur militaire de Paris à la Libération.
Le commandant Jean-Jacques BARRE (X1922), sous les ordres du général Paul ARNAUD (X1906) et du colonel Louis GENTIL (X1919), dont le service du Matériel sert de couverture, est chargé d’une étude clandestine d’“obus-fusée” (en fait le premier engin sol-air français) ; le capitaine Marcel DERRIER (X1928) lui est adjoint. L’équipe de J.-J. BARRE effectue des essais au banc, les essais en vol étant programmés dans le Sahara pour novembre 1942. Le schéma de fusée-sonde ci-dessus datant de 1941, première ébauche d’un engin sol-air, donne une idée de l’objectif visé.